©-DR- Valérian et la Cité des mille planètes de Luc Besson (2017) p58
09/07/2018 23:35 par tellurikwaves
Aujourd’hui souvent décrié voire moqué, non sans quelques raisons, par une partie de la critique qui regarde avec un mélange de circonspection et parfois d’amusement (il est devenu une cible facile pour ceux qui aiment se payer de bons mots pour assassiner des films et des auteurs) sa carrière, il faut reconnaître à Luc Besson le mérite de n’avoir jamais cédé ni à l’abattement, ni à l’aigreur, et de continuer à écrire et mettre en scène ses rêves de gosse, tel un enfant indifférent au regard des adultes, parlant à ses jouets et s’inventant des histoires improbables.
Le tout puissant producteur / réalisateur autrefois enfant prodige du cinéma français (il faut se souvenir de l’aura dont il bénéficiait légitimement après ses six premiers films: Le Dernier Combat, Subway, Le Grand Bleu, Nikita, Léon, Le Cinquième Élément) était attendu (au tournant) pour son retour à la science fiction 20 ans après le Cinquième Élément pour lequel il collabora avec Jean-Claude Mezières, qui n’est autre que le dessinateur de la célèbre bande-dessinée, enfin portée à l’écran par le Peter Pan du cinéma français. L’ayant découvert à l’âge de 10 ans, Luc Besson aura attendu d’avoir les moyens techniques et financiers de rêver plus grand. Valérian et la Cité des Mille Planètes a en effet réuni le plus gros budget de l’histoire du cinéma français et des compétences techniques qui n’ont pas grand chose à envier au cousin américain.
Transpirant par tous ses pores d’un amour inconditionnel pour le matériau d’origine et d’une passion juvénile intacte pour le cinéma tel que le conçoit Luc Besson, c’est à dire un gigantesque magasin de jouets dans lequel l’enfant qu’il est s’éclate sans aucune retenue, Valérian et la Cité des Mille planètes est le prototype du film « attachiant ». On en voit tous les défauts, parfois exaspérants mais il est bien difficile de lui résister totalement et de ne pas faire preuve d’indulgence, tant ce film échappe au formatage des blockbusters que l’auteur de ces lignes déplore par ailleurs.
Bulles de Culture (fin)
En tout cas, Valérian et la Cité des mille planètes de Luc Besson ne contredit pas cette tendance avec un scénario très en-dessous de son potentiel visuel et sonore. C’est d’abord un début qui traîne étrangement alors que ce genre de films a plutôt tendance à avoir des prologues qui nous plonge au cœur de l’action avant de prendre ensuite son temps pour nous décrire l’univers créé de toutes pièces pour le film à travers la figure d’un héros que nous suivons.
C’est un ensuite un choix de caractérisation de deux héros super cool (très tendance actuellement, surtout depuis le succès surprise de Les Gardiens de la Galaxie(Une daube totale ! TW) avec deux jeunes personnages qui flirtent et se taquinent mais qui manquent au final de profondeur. C’est enfin ces fausses pistes qu’on oublie de traiter plus tard comme ce méchant Igon Siruss croisé par Valerian sur le Big Market qui lui promet à celui-ci qu’il le reverra mais qui en fait ne tiendra jamais sa promesse.
Alors, faut-il aller voir Valérian et la Cité des mille planètes en salles ? Oui pour la prouesse technologique impressionnante qu’est le film. Mais attention, comme une place de cinéma coûte de l’argent, il ne faut pas s’attendre à un scénario aussi complexe que l’univers décrit ou à un casting de premiers rôles particulièrement épatants.
Par contre, il faut reconnaître que Luc Besson a réussi son nouveau défi — artistique en tout cas, mais nous ne faisons pas trop de souci sur le plan commercial — de faire le film « français » le plus cher de l’histoire. Et nous espérons sincèrement que ce celui-ci sera suivi de suites, en particulier pour passer plus de temps dans les arcanes de la station Alpha et du Big Market. Mais si possible avec une partie de ces gros budgets investi aussi dans un scénario tout aussi ambitieux.
La critique frenchy
Jean-Christophe Nurbel (part 1)
Rédacteur en Chef / Editor in Chief chez Bulles de Culture
Flop aux États-Unis — où le film est sorti en avant-première — et succès dès son premier jour de sortie en France — en attendant sa distribution dans le reste de l’Europe et surtout sur le grand marché asiatique (dont la Chine qui est partenaire sur le film)—, Valérian et la Cité des mille planètes est un nouveau pari fou de l”auteur-réalisateur et producteur Luc Besson. Et pour l’avant-première à laquelle nous avons été invité à assister au MK2 Bibliothèque, nous avons eu droit avant d’entrer en salles à du popcorn (salé ou sucré, au choix) et à une petite bouteille d’eau. Une façon peut-être comme une autre de se prémunir des critiques trop cinglantes américaines et de rappeler que cefilm de science-fiction se veut avant tout être un grand film de divertissement. Pari réussi ?
Allez, ne tournons pas autour du pot et disons le tout de suite avec ces 2500 plans truqués, ses 600 costumes, ses 60 décors et son prologue sur la chanson Space Oddity de David Bowie, Valérian et la Cité des mille planètes est un long métrage époustouflant sur le plan visuel. Pas aussi fou qu’un Mad Max: Fury Road (2015) (Grosse daube !)mais tout aussi impressionnant. A tel point que l’on regrette que ce film SF aille trop vite à certains moments. Pas sur feu la planète Mül où on ne comprend pas trop ce qu’on voit et les corps amincis de ces habitants laissent à penser que les troubles alimentaires évoqués dans le long métrage polémique To the Bone (2017) sur Netflix ne seront probablement toujours pas réglés dans des milliers d’années.
Mais par contre, le Big Market et l’idée géniale de l’utilisation d’un casque de réalité virtuelle pour y accéder ou la station spatiale Alpha, la fameuse Cité des milles planètes, nous aimerions nous y balader plus librement plutôt que de suivre le parcours du scénario-croisière pas très intéressant que nous propose Luc Besson.
En fait, Valérian et la Cité des mille planètes est un marqueur de son temps mais n’est pas du tout un film en avance sur son temps. En effet, ce long métrage résume les qualités et les défauts de la fiction française. Ainsi, côté qualité, le savoir-français en terme d’animation et d’effets spéciaux est reconnu depuis longtemps et le voir enfin dans un film « français » au budget XXL fait clairement plaisir.
Mais côté défauts, le film rappelle aussi les critiques souvent faites sur les scénaristes français incapables de faire aussi bien que les anglo-saxons sur des scénarios de fictions plus ambitieux. Ce n’est plus tout à fait vrai ? Où sont les scénaristes français sur des projets de divertissement à gros budgets tels que les séries Versailles ou Riviera ? Il y a bien la série Marseille de Netflix mais s’agit-il vraiment d’un contre-exemple ?
Valérian et la Cité des mille planètes réalise une performance en dessous des attentes en Amérique du Nord ; il rapporte 17 007 624 US$ lors de sa première fin de semaine d'exploitation[56], alors que les projections les plus précoces espéraient entre 20 et 25 millions de dollars compte tenu de la concurrence d'une autre grosse production, Dunkerque de Christopher Nolan[57], et se classe 5e à son entrée au box-office américain. La fréquentation est en fort recul dès la deuxième semaine (6 360 085 US$, -62,6 %, 8e au box-office[48]).
Face aux faibles performances du film en Amérique du Nord, la Chine apparaît très tôt comme un marché à fort potentiel qui pourrait assurer ou non la rentabilité et les suites du projet. Luc Besson y est en effet connu très favorablement[58], Lucy ayant récolté 44 millions de dollars, et Fundamental Films, investisseur chinois à hauteur 50 millions de dollars et distributeur du film, permet d'accéder à une diffusion sur 5 000 à 7 000 écrans[59]. Après un fort début avec 28,8 millions $ durant le premier week-end d'exploitation, prenant la première place du box-office aux dépens du très populaire Wolf Warrior 2[60], et 51 millions $ sur l'ensemble de la première semaine[61], les recettes chutent de 80 % en deuxième semaine, fortement affectées par Dunkerque, sorti en Chine le 1er septembre, et menacées par Spider-Man: Homecoming qui sort le 8 septembre[59] .
Évitant finalement le résultat catastrophique que laissaient présager les premiers chiffres en Amérique du Nord, Valérian ne dégage cependant pas assez de revenus pour rentrer dans ses frais, du fait de son budget très important[62]. Luc Besson dit toutefois qu'une suite n'est pas impossible, estimant qu'une base de fans conséquente est constituée. Le directeur général adjoint d'Europa Corp, Édouard de Vésinne, cède début septembre la place à l'Américain Marc Shumger, directeur général. De plus, les projets de production américains semblent devoir être réduits et l'exercice fiscal fragile d'Europa Corp initie un changement majeur dans les actionnaires de la société[63].